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« El Chuncho » de Damiano Damiani : Hasta la revolucion, siempre

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Le cinéaste Alex Cox apparaît dans un supplément du DVD et Blu-ray d’El Chuncho, le film de Damiano Damiani que Carlotta ressort dans une nouvelle version restaurée. Sa déclaration d’amour — « Un des plus grands westerns italiens, sorti la même année que Le bon, la brute et le truand« , « Un film vertueux en termes de cinématographie et de décors, merveilleusement interprété » — nous trouvera, à l’issue de la vision, tout à fait d’accord avec lui.

Cox évoquait l’interprétation d’El Chuncho, dont le titre original est Quien sabe ? Effectivement, le duo Gian Maria Volontè-Lou Castel fonctionne à merveille. Le premier est roublard, naïf et sympathique, parfait archétype du bandido mexicain dont on ne sait si les discours révolutionnaires sont sincères. L’acteur donne tout son charisme au personnage et lui invente des gestes incroyables, comme lorsqu’il récupère la lanière de son sombrero avec la langue. Le second est un dandy américain, un gringo froid et calculateur au visage angélique.

Damiani est un de ces cinéastes italiens qui s’est souvent servi du cinéma de genre pour glisser des messages politiques, à plus forte raison lorsque ses sujets prennent les allures d’un western ou d’un polar. Écrit par Salvatore Laurani — qui signera plus tard pour Damiani Confession d’un commissaire de police au procureur de la République — et Franco Solinas (La bataille d’Alger), El Chuncho décrit en effet la naissance, chez un personnage frustre, d’une conviction révolutionnaire. Le film s’ouvre d’ailleurs sur une séquence d’exécution. Dans ce Mexique du début du XXe siècle, les factions sont tellement nombreuses qu’on ne sait plus très bien qui est avec qui et qui se bat pour quoi.

Chuncho (Gian Maria Volontè) sait très bien, quant à lui, pourquoi il se bat : pour l’argent. Pour satisfaire son frère (Klaus Kinski), Chuncho tient un discours politique auquel il n’ajoute pas foi. Son cheminement, décrit dans un mélange de cynisme, de truculence et de subversion, nous amènera à ce qui est l’aboutissement du film : la dernière scène qui, en une ligne de dialogue, donne les raisons d’adhérer totalement à El Chuncho.

Dans une séquence qui pourrait rappeler Les sept samouraïs et son remake américain, Les sept mercenaires, El Chuncho veut défendre des villageois qui vont être attaqués par une armée. « Même pauvres, ce sont des hommes comme nous ! » assure-t-il à ses complices qui ont décidé de prendre la fuite. Plus tard, alors que plusieurs de ses camarades ont été tués, on lui demande : « On perd du temps à les enterrer ? » Chuncho ne répond rien et se saisit d’une pelle. L’homme, qui a passé sa vie à détrousser les autres, devient humain, se met à avoir honte d’être riche. Et à prôner la rébellion.

Rarement un film surfant sur tous les clichés des westerns se déroulant au Mexique n’a été aussi loin dans le discours révolutionnaire. El Chuncho ? À découvrir urgemment !

Jean-Charles Lemeunier

El Chuncho
Année : 1967
Titre original : Quien sabe ?
Origine : Italie
Réal. : Damiano Damiani
Scén. : Salvatore Laurani, Franco Solinas
Photo : Antonio Secchi
Musique : Luis Bacalov, Ennio Morricone (supervisation)
Montage : Renato Cinquini
Prod. : Bianco Manini, Sergio Leone
Durée : 118 min
Avec Gian Maria Volontè, Klaus Kinski, Martine Beswick, Lou Castel, Jaime Fernandez, Andrea Checchi, Spataco Conversi, Aldo Sambrell, Carla Gravina…

Sortie dans un nouveau master restauré, en DVD et Blu-ray, par Carlotta Films le 3 novembre 2021.


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