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« Yéti – Le Géant d’un autre monde » de Frank Kramer : Un King Kong à visage humain

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On ne peut que noter, chez cette créature qui se retrouve au centre de Yéti – Le Géant d’un autre monde, un cousinage avec King Kong. Ce film de 1977 de Gianfranco Parolini, qu’il signe sous le pseudo de Frank Kramer, ressort en combo DVD et Blu-ray chez Elephant.

La parenté avec le grand singe est flagrante. Comme lui, ce pauvre Yéti est récupéré par une équipe de scientifiques — et même, nouveauté, décongelé dans les airs — et ramené dans la grande ville, ici Toronto. Comme lui, il va s’attacher à un tout petit échantillon d’humains, les petits-enfants du milliardaire qui a financé l’expédition et le paléontologue qui l’a ramené à la vie. Comme le gorille, Yéti ne va pas se faire aux foules qui se pressent pour le voir et s’effraient d’un rien — un mec gigantesque qui se met à rugir. Et, comme ce pauvre Kong, on lui fera comprendre que ce monde n’est pas pour lui.

Sympathique petite série B bien menée, Yéti joue sur des effets spéciaux plus ou moins fauchés : ainsi la grosse paluche qui, si ça se trouve, a été récupérée sur le King Kong de John Guillermin, produit l’année précédente par Dino De Laurentiis, et qu’on reverra encore dans le Rêve de singe (1978) de Marco Ferreri, lors d’une balade de Gérard Depardieu sur les quais de New York. Mais, quand une partie de son corps (les mains et les pieds) n’est pas vue en gros plans avec des humains à côté, l’essentiel du gigantisme du Yéti est montré grâce à des transparences.

Et puisqu’on en est aux emprunts, ne nous gênons pas. Ainsi, la musique a beau être signée par Sante Maria Romitelli, le thème lié au Yéti vient en droite ligne du Carmina Burana de Carl Orff, dans des arrangements plus modernes.

Côté interprétation, Tony Kendall (de son vrai nom Luciano Stella) est le plus connu, vedette de nombreux films italiens d’aventures, westerns, policiers, fantastiques qu’on retrouve même aux côtés de Bébel dans Flic ou voyou et Le Guignolo. À ses côtés, la jeune fille créditée Phoenix Grant est en fait Antonella Interlenghi, fille de deux vedettes du cinéma italien, Franco Interlenghi et Antonella Lualdi.

Jane et Herbie, les enfants qui se prennent d’amitié pour le grand type poilu étant jeunes — Antonella Interlenghi a 16 ans et son frère est plus petit encore —, Parolini et ses deux coscénaristes, Mario Di Nardo et Marcello Coscia, ne peuvent s’amuser à recréer l’érotisme du premier King Kong, celui de 1933. Ils se rattrapent avec des éléments susceptibles de plaire à un plus jeune public, tel le gentil chien qui accompagnent les enfants ou la pêche du Yéti qui leur offre à croquer un poisson cru.

Même si certaines séquences ont des airs de déjà-vu, elles restent toutefois efficaces. Citons celle où, effrayés par le Yéti, des gens qui sont sur une terrasse se précipitent dans un ascenseur et, alors que notre géant s’amuse à le secouer en tous sens, s’efforcent d’en sortir à tout prix, n’hésitant pas à écraser les autres — dont l’héroïne — pour mieux se faufiler. Trois ans auparavant, une scène identique était au cœur de La Tour infernale (tiens, encore un film de Guillermin) mais Parolini a l’intelligence de la poursuivre. S’apercevant que son amie est à l’intérieur de l’ascenseur en déroute, Yéti va descendre le long de la façade du gratte-ciel pour tenter de la récupérer. Par les fenêtres, on peut voir des gens chez eux tandis que passe l’immense gaillard.

Quand on crée un tel barouf dans une ville de l’importance de Toronto, il est normal de se retrouver avec la police à ses trousses. Sauf qu’ici, les véritables méchants qui en veulent à la peau du Yéti ne sont pas seulement les flics mais surtout une entreprise concurrente à celle du grand-père. Impitoyable monde capitaliste !

Bien sûr, il ne s’agit pas de comparer Yéti à King Kong pour octroyer au premier toutes les qualités et la poésie du second. « Ce film défie le bon goût », a raison de remarquer dans le bonus la journaliste et romancière Caroline Vié. Et, quand on est dans nos bons jours, c’est vrai qu’on adore le kitsch.

Jean-Charles Lemeunier

Yéti – Le Géant d’un autre monde
Année : 1977
Titre original : Yeti – Il gigante del 20° secolo
Origine : Italie
Réal. : Gianfranco Parolini (sous le nom de Frank Kramer)
Scén. : Mario Di Nardo, Gianfranco Parolini, Marcello Coscia
Photo : Sandro Mancori
Musique : Sante Maria Romitelli
Montage : Manlio Camastro
Durée : 118 min
Avec Antonella Interlenghi (sous le nom de Phoenix Grant), Mimmo Crao, Jim Sullivan, Tony Kendall, Edoardo Faieta (sous le nom d’Eddie Faye), John Stacy, Stellio Candelli (Sous le nom de Steve Elliot)…

Sortie en combo DVD et Blu-ray par Elephant Films le 11 avril 2023.


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