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« La Famille Hennedricks » de Laurence Arné : Familles, je vous hais/aime

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La famille (recomposée) qui donne son titre au film de l’actrice Laurence Arné est quelque peu foutraque. Elle vit dans une maison de campagne mal rafistolée, avec une mare vaseuse en guise de piscine que le mari (Dany Boon) ne parvient à assainir. Dans ce couple bohème, lui a un jeune fils pré-ado (Jehan Renard) gentil et optimiste, elle (Laurence Arné) un grand ado (Ferdinand Redouloux), fatigué par l’à peu près maternel et désireux de rejoindre son père (Yannick Choirat).

Sur une situation devenu somme toute banale, Laurence Arné livre un premier film que l’on sent nourri de souvenirs familiaux, un peu rafistolés comme la bicoque dans laquelle vit tout ce petit monde. Écrit par l’actrice-réalisatrice et par Cécilia Rouaud, le scénario prend parfois l’eau et manque certainement de la folie — dans le sens d’exubérance, d’extravagance — que Laurence Arné réclame pour le personnage maternel. Cette famille Hennedricks, un nom-valise qui vient de la superposition des patronymes des deux parents — et qui sonne, bien entendu, comme le Hendrix de Jimi —, est certes sympathique mais il lui manque juste un petit quelque chose pour que le film lève, à la manière des croquettes de nouilles que ne cesse de cuisiner la mère.

Tout est peut-être un peu trop appuyé et c’est dommage. Prenons un exemple. Désirant se moquer des bobos parisiens venus se réfugier à la campagne à l’époque du Covid, Laurence Arné nous montre un couple qui vient louer la caravane installée dans un coin du jardin. Tandis que l’homme tord un peu le nez en se rendant compte de la pagaille qui règne, la femme ne cesse de s’extasier devant n’importe quoi, l’état branlant de la caravane ou la poule qui y a élu domicile. La critique aurait mérité davantage de mesure pour porter ses fruits. Beaucoup de séquences sont ainsi quelque peu too much, telle l’attitude d’un des deux flics, vers la fin du film. Ce qu’on nous présente comme une comédie — sans doute parce que le film est joué par Dany Boon — décrit en fait l’impuissance d’une mère à retenir son fils chez elle et la spirale dans laquelle elle s’enfonce pour parvenir à son but.

Propos de Laurence Arné et Dany Boon

Ce n’est pas pour rien que Laurence Arné, rencontrée à Lyon avec Dany Boon pour l’avant-première de La Famille Hennedricks, parle de « la charge mentale des mères » à propos de son film. Elle ajoute que sa double casquette d’actrice et de réalisatrice l’a aidée encore mieux à appréhender le sujet.

Sans doute la meilleure trouvaille du scénario est que cette famille est musicienne et que ses interprètes le sont aussi, autant Laurence Arné, qui joue du piano, que Dany Boon, qui lui-même, précise-t-il, manie « la guitare, le piano et quelques autres instruments ». Le film s’ouvre sur une chanson de Supertramp et la réalisatrice avoue : « Je l’écoutais avec mes parents. On mangeait des croquettes de nouilles, on mettait le disque à fond et on dansait dans le salon. »

Inutile de le préciser, cette Famille Hennedricks s’appuie sur des souvenirs d’enfance de Laurence Arné. « Je voulais rendre hommage à mes parents et aux mères de famille. Et qu’il faut y croire encore, même après une recomposition familiale. » Si Laurence Arné et Dany Boon vivent en couple depuis plusieurs années, il fallait que les jeunes acteurs choisis pour incarner leurs enfants respectifs puissent s’intégrer. « J’ai eu un coup de cœur pour eux. Ils n’étaient pas musiciens mais ont été coachés et se sont investis. Nous avons passé une semaine en résidence artistique avec eux pour créer une famille, raconte Laurence. Comme j’allais aussi jouer, il fallait que je les connaisse bien pour les diriger. Cette semaine de colo a été très utile ! » Elle a aussi servi, précise Dany Boon, « à répéter les morceaux musicaux et à les jouer en direct ».

Photo JCL

Curieusement, alors qu’elle écrivait le scénario, Laurence Arné ne pensait à aucun casting. « Une fois que j’ai eu la bonne version du scénario, je me suis dit que ce serait génial de le proposer à Dany. Génial de l’amener dans mon univers. » Finalement, elle accepte aussi de tenir le rôle féminin et se dit « avoir été angoissée de se retrouver devant et derrière la caméra. J’ai travaillé avec un coach d’acteur, j’ai bossé mon jeu puis, sur le plateau, je me suis oubliée et j’ai pu me mettre au service des acteurs et des techniciens ».

Quand on demande à Dany Boon, puisqu’il a dirigé plusieurs films, s’il a donné des conseils à sa compagne, il répond : « Je l’ai poussée à le faire car elle ne se sentait pas légitime. Elle a d’abord écrit seule, puis avec Cécilia Rouaud, pour décrire cet univers familial. Quand je suis acteur, je ne veux pas influencer le metteur en scène. J’ai proposé plutôt des choses à travers mon personnage mais il fallait que ce soit sa vision à elle. Il est important qu’un film soit la vision d’une seule personne, même si je ne suis pas toujours d’accord avec les choix. Il m’est arrivé, de rares fois, d’être en présence de réalisateurs débutants qui hésitent sur certaines décisions. J’ai suggéré des choses, les autres acteurs et les techniciens aussi et on se retrouve avec un film collectif qui n’a plus une vision unique. »

Et puisqu’il est question, avec La Famille Hennedricks, de famille et de musique, Dany Boon ajoute, tout fier : « Mon fils Noé, qui est musicien, sort son premier single ce 7 juin. »

Jean-Charles Lemeunier

La Famille Hennedricks
Année : 2024
Origine : France
Réal. : Laurence Arné
Scén. : Laurence Arné, Cécilia Rouaud
Photo : Guillaume Schiffman
Musique : N/A
Montage : Anne-Sophie Bion
Durée : 85 min
Avec Laurence Arné, Dany Boon, Ferdinand Redouloux, Jehan Renard, Yannick Choirat, Oscar Copp, Marie Lanchas…

Sortie en salles par Gaumont le 26 juin 2024.


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