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« Démons 1 et 2 » de Lamberto Bava : Les films sont responsables

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À la grande époque du cinéma de genre, les Italiens ont toujours aimé surfer avec humour sur les courants à la mode en provenance des États-Unis et la sortie chez Carlotta des deux volets de Démons (Demoni), réalisés par Lamberto Bava en 1985 et 1986, confirme cette constatation.

Tout commence dans un métro et par le malaise dans lequel un étrange voyageur, portant un masque sur la moitié du visage (joué par le futur cinéaste Michele Soavi), plonge une jeune passagère (Natasha Hovey) dans l’effroi. Le type distribue en fait des prospectus et lui glisse dans la main une invitation pour une soirée qui se déroule dans un cinéma, le bien nommé Métropol. Bien nommé parce que la scène se déroule à Berlin et que le Métropolis de Fritz Lang, en 1927, est l’un des premiers grands films d’anticipation.

N’entrons pas trop dans les détails mais le titre du film en dit déjà beaucoup : des démons vont surgir et prendre au piège les spectateurs. Les grands courants américains étaient évoqués en début d’article et il est évident ici que Lamberto Bava a en tête les films de zombies et la trilogie de George Romero : La nuit des morts vivants (1968), Zombie (1978) et Le jour des morts vivants (1985). Si Bava délaisse la portée subversive et politique flagrante des films de l’Américain, comme lui, il dose avec beaucoup d’humour ses effets spéciaux très gore. Avec, en outre, une mise en abyme du cinéma vu au cinéma, qui sera réutilisée en 1987 par Bigas Luna avec Angoisse. Il est aussi question ici d’un masque qui va déclencher toute l’histoire. Coucou papa Mario et ton Masque du démon.

Une fois entrés dans le cinéma, les héros de Démons ne vont plus le quitter et cette unité de lieu va se doubler d’une unité de temps — tout se déroule en une nuit — et d’action : il s’agit, tout au long du film, de combattre encore et toujours le même fléau. La règle du théâtre classique respectée à ce point, c’est fort !

Lamberto Bava et ses scénaristes (Dardano Sacchetti, Franco Ferrini et Dario Argento, qui produit également) ont forcément entendu la critique récurrente adressée épisodiquement au cinéma : la violence montrée à l’écran engendre la violence dans la rue. Les films sont responsables. N’y allant pas par quatre chemins, ils prennent au pied de la lettre ces accusations : les démons du film projeté débarquent dans la salle. L’ironie se situe jusque dans les détails. Dans le métro, Natasha Hovey tient dans les mains une partition de Bela Bartok, qui utilisa beaucoup dans ses compositions la musique folklorique. À son tour, Bava se sert du folklore des films de vampires et de morts vivants pour enrichir son récit. Et, pied de nez ultime, la bande son du film comprend une série de morceaux de heavy metal, très éloignés de Bartok : Mötley Crüe, Saxon, Billy Idol, Pretty Maids, etc.

Comme le remarque justement Romain Vandestichele, spécialiste de Mario Bava, dans un bonus, le cinéma de genre italien ose tout. Et c’est sans doute, comme nous le soufflerait si justement Michel Audiard, à ça qu’on le reconnaît. Et il faut admettre que les péripéties sont de plus en plus incroyables, entre autres celle où apparaît un hélicoptère.

Tourné l’année suivante, Demoni 2… L’incubo ritorna est encore plus plaisant. Cette fois, c’est un immeuble que les démons attaquent. Outre le plaisir de retrouver une toute jeune Asia Argento, le scénario (dû aux mêmes) isole différents personnages dans des appartements, face à des situations extrêmes et des contaminations attendues mais malgré tout surprenantes.

Rien de bien sérieux dans tout cela me direz-vous, si ce n’est un plaisir tout aussi contagieux que la morsure des démons.

Ajoutons qu’un Démons 3 sera tourné en 1991 par Umberto Lenzi mais il n’a rien à voir avec le diptyque de Lamberto Bava, l’histoire se déroulant au Brésil et mettant en scène des zombies.

Jean-Charles Lemeunier

« Démons » et « Démons 2 » de Lamberto Bava : sortis par Carlotta en éditions 4K Ultra HD DVD et Blu-ray le 5 avril 2022.


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